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14 juillet 2008 1 14 /07 /juillet /2008 08:32
Train Chengdu - Hohot.

Samedi 12 à 22h30 sonnées, le train s'éloigne de Chengdu. Je quitte donc la capitale du Sichuan, en ayant eu à peine le temps de l'apercevoir et dans l'impossibilité d'en confirmer pleinement le dicton : «la Chine est le pays de la gastronomie, mais le Sichuan est le pays des saveurs !». Je suis assise sur une banquette dure près d'une fenêtre, trois personnes me faisant face et deux autres dormant déjà à côté de moi. Je découvre donc le système des quatre classes ferroviaires chinoises : couché mou, couché dur, assis mou, assis dur ! La première étant la plus chère et la plus difficile à obtenir et la dernière celle du peuple, celle où l'on s'entasse comme du bétail. Le wagon est donc surchargé, les hommes torse nus et tout le monde pieds nus. Je vous laisse imaginer l'odeur qui s'exhale dès que le train s'ébranle. À ma stupéfaction, je découvre qu'il n'y a pas de climatisation, que les chinois si respectueux des règles et des lois, n'ont que faire de celle qui interdit de fumer dans le train. Résultat, nous roulons depuis une heure, l'air est irrespirable et la température avoisine les 42 degrés !! J'ai trente-huit heures à passer dans cette fournaise, elles vont se transformer en cauchemar...

Après une heure de train, la température du wagon avoisine les 42° !

Je passe ma première nuit entre somnolence et lecture. Je tente de suivre notre itinéraire sur la carte. Dès que je la déploie, c'est comme si vingt personnes me montaient dessus. Un de nos premiers arrêts est Deyang. Dans le noir, je ne peux m'empêcher de penser que derrière Deyang se dressent les Qiong Lai Shan, la faille de Wenshan et les ruines de combien de villages et de villes pulvérisées en deux minutes interminables le 12 mai dernier... Puis viennent Guangyuan, Baoji, nous remontons l'ouest du Sichuan en bordant les lieux de la tragédie.

Enchevêtrés, les passagers arrivent à trouver le sommeil dans n'importe quelle position

Le lendemain, le train entre en gare de Lanzhou, le pays des lamian pour moi. J'aperçois au loin les eaux jaunes du Huang He qui ont perdu leur couleur Himalaya avec l'arrivée sur le plateau du loess. Depuis plus d'un millénaire, Lanzhou est une ville de garnison, une des nombreuses oasis où les caravanes de la route de la Soie, transportant marchandises et idées nouvelles entre la Chine et l'Asie centrale, faisaient étape... Entre volutes de fumées et divagations, je nous débarquerais bien ici avec Multi pour continuer notre route vers l'Ouest sur les traces de tant de pèlerins célèbres ou inconnus le long des routes de la Soie... mais le train oblique vers Yinchuan alors que la deuxième nuit s'annonce plus éprouvante encore.

Nous saluons sans doute une partie peu connue de la grande muraille ici, mais mon nez aplati contre la vitre ne verra que nuit noire et désert sans fin. Je me rends compte soudainement que j'ai mal aux pieds depuis un moment et décide enfin d'y jeter un regard. Mais arriver jusqu'à mes pieds alors que je suis congestionnée depuis plus de 24h dans ce train, c'est tout un combat ! Je découvre avec stupeur que mes pieds, cheville, mollets ont triplé de volume. Je me transforme en bibendum Michelin !! À partir de là, je passe 15mn toutes les heures debout sur mon siège à faire les cent pas dans le vide. Stéphanie, jointe par texto (ah le bonheur de la technologie moderne...) me dit que je dois absolument bouger, marcher de wagon en wagon ! Mais c'est impossible, lui rétorqué-je ! Il faut marcher sur les gens qui dorment par terre alors. Je ne suis pas allée aux toilettes depuis 24h, me restreint en eau et compte patiemment les minutes qui me séparent de la délivrance.

Lundi matin, mes genoux commencent à enfler. C'est la gangrène de la gonflette qui s'empare de moi ! N'y tenant plus, je vole de banquette en banquette, debout, parfois ratant le haut du dossier et tombant sur l'épaule d'un chinois endormi, pour atteindre les toilettes où je bloque ma respiration avant le grand saut.

Désert mongole

Wuhai, Baotou... nous sommes maintenant en pleine steppe désertique de la Mongolie Intérieure, une des 5 provinces autonomes de Chine. Plus que 3 heures pour en atteindre la capitale, Huhehaote, ma destination.

14h30, la délivrance sous un ciel bas et gris. Je patiente longuement pour récupérer Multi et mon sac alors qu'un bourdon bien lourd tisse sa toile dans ma tête. «Mais qu'est ce que je fous là ?» me dis-je.

À l'auberge de jeunesse, je souris difficilement à l'hôtesse, gauche et antipathique mais finalement obtiens un lit après avoir subi ses nombreux «meyou, meyou» (y'en a pas).

Ô bonheur, je partage ma chambre avec une polonaise et une allemande, voyageuses solitaires également. Mais je ne suis pas en verve, et les écoute distraitement en tentant de faire dégonfler mes pieds difformes dans une bassine d'eau froide.

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commentaires

Y
très belles photo !! imprétionnant
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