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25 mars 2008 2 25 /03 /mars /2008 11:32
Mardi je pense que c'est ma dernière journée avant le départ vers l'ouest. C'est sans compter sur ma "rencontre" avec Lu Nan au Art Museum de Guangzhou. La veille, Carrie m'a parlé d'une exposition de photos sur la vie des Tibétains à travers le regard d'un photographe chinois, Lu Nan. Au vu des derniers événements de l'actualité je me dis que je dois voir ca... Surtout quand jamais je n'avais pensé voir une expo ici. Nous partons sous la pluie avec Wan Qi Wen Amélie en vélo. Elle commence son travail à l'auberge à 15h30, il est 8h30, ce qui nous laisse du temps. Mais le chemin n'est jamais direct pour moi...

Un art de vivre

Je m'arrête 100 fois pour photographier les sportifs du matin : la Chine a une véritable culture du sport. Les parcs sont plein d'adeptes du Tai-shi, du Jianzi, de femmes qui dansent au ralenti au son d'une chaine stéréo.

Ferry sur la rivière des perles

Alors qu'on prend le fameux ferry raté hier dans la nuit, je souris a un monsieur dont j'aime le visage et voilà qu'il me parle ! Wan Qi Wen me traduit qu'íl va nager, qu'íl veut nous montrer le chemin (que je connais...). Je n'hésite pas une seconde et je lui demande si je peux aller avec eux... Nager, enfin les voir nager, car je suis absolument sidérée qu'il se baigne dans la rivière des perles. Je tente un timide "mais la polution..." et les rires fusent en guise de réponse "Ici, ça va, ça n'est pas pollué". Quand je vois le "ici", j'ai du mal a le voir différent du "là-bas", de couleur trouble et indéfinissable...

Un sport pour vivre

Malgré les chemins de traverse empruntés, nous finissons par arriver au musée où sont présentées 3 expositions photo dans des salles gigantesques. La Belle Epoque selon Lartigue (1ère fois en Chine mais je m'en passerai), le sport en Chine à travers les années et le regard de plus de 800 photographes ( je ne peux mieux tomber avec mes réflexions du matin sur cette culture du sport..) et puis un 1ere étage entièrement consacré a Lu Nan. C'est la révélation.

Exposition Lu nan

Après ma traversée nocturne de la ville, mon voyage prend un sens encore plus fort ici. Je n'ai jamais entendu parler de ce photographe (honte à moi) et pendant plus de 3h je vais recevoir en plein coeur plus de 300 photos N/B format géant (même les photos sont à la taille du pays ici...), toutes plus bouleversantes et excellentes les unes que les autres. La 1ère partie est consacrée à l'état des hopitaux psychiatriques en Chine. Le constat est terrifiant mais le regard est aimant, plein de respect pour ces femmes, enfants, hommes, abandonnés pour la plupart maltraités, qui sont au-delà de la souffrance. La 2ème partie retrace l'histoire des catholiques aux 4 coins de la Chine. Enfin la 3ème raconte la vie quotienne des tibétains au fil des saisons. E X T R A O R D I N A I R E. Ce photographe de 45 ans a passé plus de 10 ans sur ces 3 sujets, pour en ressortir un témoignage d'une humanité à couper le souffle. Je rentre à l'hôtel avec ces images qui me poursuivent.

Lu Nan, la vie quotidienne au Tibet

Le soir Kin viendra à mon secours encore pour trouver la solution à mes problèmes techniques de connexion, de programmes pour redimensionner et compresser les photos, "Aie Camille por Dios!" me dit-il désespéré. Je lui explique que je suis née au temps du néolithique question technologie, alors en chinois... Nous nous quittons après un repas d'adieu cantonnais au style dominicain. Je sais que je peux compter sur lui comme sur mes nouveaux amis pour la suite de mon voyage.

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24 mars 2008 1 24 /03 /mars /2008 10:08
Après deux jours de pluie, le voile de polution atmosphérique se dégage et je vois enfin un bout de ciel bleu. Est-ce possible ? Lundi de Pâques, me dit quelqu'un à l'hotel. C'est le bon jour pour vaincre ma peur ! Multi, tout beau tout prêt, car je l'ai remonté la veille, m'attend depuis notre arrivée, relégué dans un cagibi. Plan de la ville en main, portable au fond de la poche (faut pas pousser mémé dans les orties quand même...), casque sur la tête, c'est notre première sortie ! Si le Code Routier est plus ou moins le même dans le monde entier, chaque ville a sa manière de l'adapter et créé ses propres codes qu'il faut apprendre pour pouvoir se faufiler partout. C'est donc le but de ma sortie avec Multi aujourd'hui.

Pouvoir se faufiler partout...

Guangzhou est une ville tentaculaire, construite dans une des régions les plus riches du pays et dont le boom économique ne cesse de s'accroître ainsi que sa taille au détriment du paysage subtropical qui a quasiment disparu sous l'urbanisation à tout va. Une légende raconte que la ville a été fondée par des esprits venus du ciel à dos de chèvre. Située au nord du détroit de la rivière des Perles, tournée vers la mer depuis des siècles, elle a longtemps eu une image rebelle : lieu de diverses rebellions au pouvoir central, naissance du parti communiste et siège des nationalistes. C'est sur ses 800km de côtes que débarquèrent les premiers marchands étrangers. Ainsi commenca la route maritime de la soie, puis s'installèrent des comptoirs commerciaux portugais puis anglais. Aujourd'hui c'est la capitale des usines du monde, une des plaques tournantes de l'import-export mondiale. N'est-ce pas dans cette région du Guangdong que 3 jouets sur 4 au monde sont fabriqués ? Comme 1 télévision sur 4, 1 machine à laver sur 3, etc... Le consumérisme à outrance semble s'être emparé de cette ville où la lumière naturelle fait cruellement défaut face aux dizaines de milliers de néons.

Ce lundi 24 mars donc, je pars à l'assaut de Guangzhou, la chaotique, sur ma vaillante monture prénommée Multi. Bei, Nane, Dong, Xi. Je repère d'abord ma fameuse Fangcun Dadao Lu, celle qui sera ma porte de sortie dans quelques jours. Les rues en Chine sont très longues, pourtant leur nom semble changer tous les 200 mètres. En fait on retrouve souvent une série d'indications, notamment les points cardinaux qui situent les rues l'une par rapport a l'autre. Associé a Zhong (centrale) Huan (circulaire) et à certains chiffre, on obtient par exemple Xisanzhong Nanlu. Qui veut dire ? Ok personne ne suit... Ouest 3ème Route Centrale Sud, et mieux encore partie Sud Ouest de la 3ème Route Centrale. Je fais ma maligne mais je me contenterai de savoir lire un carte, repérer le Bei du Nane et le Dong du Xi, les panneaux étant dans les grandes villes en caractères chinois mais aussi en traduction pinyin (système de transcription du chinois en lettres latines a partir de 1958. Il est très présent dans les villes, beaucoup moins à la campagne. Mais le pinyin requiert également un apprentissage car il ne se prononce pas comme le français. Exemple: c = ts en pinyin ou alors x = s ).

Premiers feux rouges, en bonne conductrice, je m'arrête et me fais doubler, klaxonner (peut-être insulter ?) par des dizaines de vélos, tricycles à moteurs, cyclos-pousse, dont on ne perçoit parfois pas le conducteur caché sous d'innombrables et impensables paquets. Deuxième épreuve : les ponts. Guangzhou étant construit dans le delta de la rivière des Perles, cela signifie qu'il y a des ponts partout qui enjambent des bras de rivière dans tous les sens. Jusque là tout va bien. Mais certains de ces ponts sont des expressways, accessibles uniquement aux véhicules rapiiiiiides. Multi a beau être en super forme, je n'ai pas du tout l'intention de m'y risquer. Sinon ce sont des tunnel pour les voitures et des ferries pour les piétons et vélos. Aux alentours de 13h, j'ai acquis les base de la conduite chinoise a vélo dont la première règle est de faire comme les autres vélos si on veut survivre. Je me faufile à contresens, traverse l'autoroute avec une bonne vingtaine de vélos, certains portant 5 bouteilles de gaz qui tiennent par je ne sais quel miracle. L'union fait la force paraît-il. J'essaie de ne pas penser à ce que je suis en train de faire sinon je risque d'être paralysée au milieu de la route. Sur le bord des routes, tous les 100m on trouve des réparateurs de vélo. Je m'arrête, j'aimerais vous dire que je m'assois pour discuter avec eux... Echange de sourires et de regards. Siesie, merci. Je repars presque à regret.

Réparateur de vélo


L'après-midi se poursuit par la visite des îles de Shamian et Er Sha, la première étant le lieu de l'ancienne concession étrangère (britannique et francaise) acquise suite aux guerres de l'opium en 1859 (ces méchants anglais introduiront cette drogue, venue d'Inde, en Chine. Elle fera des ravages rapidement et provoquera 2 guerres, qui permettront aux marchands occidentaux de s'établir définitivement dans l'Empire du Milieu...). La deuxième étant le lieu de villégiature de chinois expatriés rentrés au pays à la fin du 19ème siècle. Ce sont presque des îlots de silence et de verdure en comparaison du reste de la ville.

À bord d'un ferry


Nouvelle rencontre avec Carrie qui me guide en vélo dans les ruelles de ces îles. Le soir je me laisse tenter par un nouveau resto de cuisine typiquement cantonnaise, accompagnée de Carrie et d'un anglais, professeur d'anglais, typiquement anglais puisque bien que vivant en Chine depuis sept ans, il ne parle pas un mot de chinois. Nous passons d'abord devant des aquariums gigantesques ou barbotent poissons, molusques et crustacés, tortues, serpents d'eau douce et là, on fait notre choix ! Quelques minutes plus tard nous avons devant nous 7 ou 8 plats aux saveurs toutes différentes. J'en perds presque l'usage de mon anglais, very fluent (avec un mot d'espagnol tous les 5 mots) ! Impossible de savoir tous les noms de ce que je mange mais c'est tout simplement EXCELLENT. Je ne suis pas encore passée pro de la baguette, mais j'y travaille. L'avantage, c'est que ca me calme, habituée que je suis à " manger sur une fesse" (visualisez la situation, c'est très parlant... Expression que j'ai entendu si souvent me répéter ma moooooman), sur un coin de table, debout, entre un bus et un train à rater !

Un menu vivant


Puis vient le grand moment de la journée... Celui qui sonnera le glas de ma peur !

Avant le restaurant, j'ai bien tenté de dire a Carrie que je ferais mieux de laisser Multi à l'auberge de jeunesse, mais je me suis laissée convaincre de le garder (grosse erreur... Première règle en voyage : toujours suivre SON instinct, pas celui des autres, aussi bienveillants soient-ils). Il est donc couvé par les regards de 3 gardiens, plus les miens qui se ramènent de temps à autres. Le retour est bien sur facile, selon Carrie (qui ne se déplace jamais à vélo la nuit...) : dzouo, yo, dzouo... Gauche, droite, gauche. Il est 23h15, la nuit a ralenti la frénésie de la circulation. Pourtant, en dessous du fameux tsiao (pont) surélevé a droite, la route ne mène nulle part sauf à un camp de police et le tsiao surélevé c'est un expressway ! J'avise un monsieur. Langage des signes. Je montre mon plan. Il le prend à l'envers me parle pendant dix minutres sans doute parce que je commence à avoir un air chinois. Je fais marche arrière puis prend la première à gauche qui devrait me mener jusqu'au pont... De là, je trouverai peut être un trottoir en sens inverse emprunté par tout le monde. Mais non, le pont est perché dans les airs...

Quand je baisse la tête je suis face à un chantier où s'activent des dizaines d'ouvriers dans la gadoue... Pas de néons ici... Juste un projecteurs qui "allume" les ouvriers... Je suis tentée un moment de m'approcher... Voici les fameux chantiers des mingongs. Mais je me rappelle que je suis quand même un peu... perdue, que je vais attendre pour d'autres expériences nocturnes. A côté 3 jeunes jouent aux cartes. Relangage des signes, tout le monde rigole, des enfants sortent d'une petite maison voisine, une femme au visage tout rond donne des ordres a toute cette petite troupe. Je pige que dalle. Finalement je vais peut-être dormir là... Je me souviens alors que j'ai un portable avec 5 numéros d'amis chinois qui parlent anglais ou espagnol. Commence un long échange entre Wan Qi Wen et un jeune puis Wan Qi Wen et moi, puis à nouveau le jeune et Wan Qi Wen Amélie... Ceci pendant 1h puisque le jeune finit par prendre son vélo pour m'accompagner jusqu'à l'entrée du tunel... interdit !!! Ouf un gardien est là pour m'en barrer l'accès. Il me dit de laisser Multi cadenassé et de prendre un taxi, je refuse : ma relation est déjà passionnelle avec Multi, je ne peux l'abandonner. Je sais ou je suis : un bras de rivière me sépare de l'hôtel mais le service de ferries est terminé, le tunnel interdit... Il ne me reste qu'à refaire les 30km de détour de ce matin. Demande lui juste de me mettre sur la rue Huangsha Dadao Lu, dis-je à Amélie. Aussitôt dit aussitôt fait. Je le remercie et déjà il s'éloigne avec son t-shirt "soleil de France". Je vous épargne le retour fait à toute allure en longeant à contresens une autoroute. J'arrive à l'hotel à presque 3h du matin et ne sait comment remercier Amélie qui m'attend encore.

La nuit est courte, tant d'émotions m'empêchent de dormir. Je repense à cette population de la nuit que j'ai entr'aperçue. Ces ouvriers sur le chantier, ces ombres sous les cartons, dans les recoins : des familles entières vivent dans la rue. Je me dis que la nuit révèle bien évidemment l'envers du décor de cette croissance économique spectaculaire. Que cette Chine des laissés pour compte est aussi celle que je veux découvrir; mais comment l'atteindre ?

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23 mars 2008 7 23 /03 /mars /2008 15:18
Dimanche c’est jour de marchés. J’arpente les ruelles du marché Qingping (le marché de la paix lumineuse) qui abrite des étals d’herbes médicinales en tout genre, d’animaux desséchés utilisés dans les préparations de médecine chinoise. Ce marché est l'un des plus connus de Chine, car on y trouve de nombreux animaux domestiques destinés à la consommation alimentaire.

Les régions du sud de la Chine sont effectivement célèbres pour la cuisine de mets delicats tels le chien, le chat, le serpent... âmes sensibles s’abstenir ! Kin me dira que c’est désormais interdit en ville, Wan Qi Wen me dira, elle, manger du serpent de temps en temps, à la campagne.

J’aime les marchés ! Pas un pays visité où je ne passe des heures à observer ces lieux de vie extraordinaires. Il me semble que c’est le meilleur endroit pour découvrir un pays et faire connaissance avec ses habitants et leurs coutumes. En Chine ça se complique un peu car comme vous commencez à le savoir, je suis vite réduite au niveau expression orale. Qu’à cela ne tienne, je regarde les gens, les écoute me parler, se moquer sans aucun doute de moi.

Ça fourmille dans tous les sens, ça crie, ça rie, ça mange, ça dort, ça joue aux cartes, ça charge un vélo, une charrette au delà de l’imaginable et puis ça rie encore. J’ai l’impression que la gymnastique des zygomatiques détient la place numéro 1 dans la longue liste des sports pratiqués par les chinois !







Le Marché Qingping




Après les remèdes miraculeux, je me rends à un marché d’un autre genre : celui de la contrefaçon ! Là, c’est... comment vous dire ?... C’est la jungle !!!

Le Marché de la contrefaçon

J’entends parler à peu près toutes les langues possibles de même que je vois toutes les couleurs de peau imaginables. Il semble que tous les continents se donnent rendez-vous ici pour se fournir en fausses montres Rollex, en faux iPod, fourrures d’animaux protégés et parfums Gucci sous l’oeil bienveillant des autorités chinoises. Mon appareil photo n’a pas l’air  bienvenu.

Je visite ensuite rapidement les sites révolutionnaires de la ville : le mémorial de Sun Yat-Sen, premier président de la république de Chine, l’institut du mouvement paysan ou Mao Zedong créa le centre de formation communiste, enfin, le parc mémorial des Martyrs, hommage aux victimes de la guerre civile entre nationalistes et communistes.

Tous ces lieux sont envahis de touristes chinois qui se photographient les uns les autres. L’Histoire est importante pour comprendre un peuple, mais ces monuments ne me parlent guère et je me sens mieux au milieu des marchés a ne rien comprendre.

C’est l’appel du ventre, je reprends le chemin du voyage culinaire cette fois-ci en centre ville au milieu des néons lumineux. De retour a l’hotel, je m’endors en rêvant des routes de campagnes loin du tumulte de cette ville chaotique aux constructions anarchiques.




Canton by night
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22 mars 2008 6 22 /03 /mars /2008 14:19
Le lendemain je passe de la rencontre virtuelle à la rencontre en chair et en os avec Kin et Huang Sun, alias Emma (les prénoms sont souvent occidentalisés chez certains jeunes. Je ne sais dire si c’est pour nous rendre la vie plus facile ou si c'est une volonté de s’occidentaliser), connus grace à internet avant mon depart.

Huang Sun "Emma"


  Kin, le chinois latino.


Kin possède la double culture chinoise–latino : rentré en Chine depuis moins d’un an, il a vécu quinze ans en République Dominicaine. Il espère passer 15 ans dans son pays et il a aussi la ferme intention de découvrir ensuite la culture francaise... pendant 15 ans !

Je me régale à parler espagnol sud américain avec lui. C’est presque surréaliste : je suis en Chine, je ferme les yeux et c’est l’Amérique du sud. Au pas de course avec lui (on est samedi, il sort de son travail et travaille également dimanche matin, 6 jours de vacances par an, chapeau bas !), je continue mon voyage culinaire, part en quête de carte sim et recharge portable, puis de cartes routières chinoises de la région.

J’ai l’impression que parfois je viens d’une autre planète, Kin est encore plus inquiet de mon voyage que ma propre famille et se met en quatre pour me donner tous les tuyaux ici. Je ne saurais encore dire si c’est typiquement chinois, je peux juste dire que c’est très... latino !!

Le soir ma vie sociale ne s’arrête plus, je fais connaissance avec Huang Sun. Son sourire et son naturel m’enchantent. Emma comme Kin fait partie des privilégiés ici car elle a fait un an d’études à Rotterdam en Hollande. Je continue avec elle l’apprentissage de quelques mots et expressions chinois.

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21 mars 2008 5 21 /03 /mars /2008 13:57
Le lendemain, j’ai du mal à décoller cette fois ! Il est 1h de l’après-midi, je viens de dormir 18 heures d’affilée. À marquer dans les annales Camille !

Je suis un peu désemparée, me sens totalement autiste dès que je passe la porte de l’hôtel et l’obsession latente du départ réapparaît: SAVOIR COMMENT QUITTER CETTE VILLE EN VELO ! Et vu l’arrivée en taxi c'est pas gagné !

Je m’écarte des laowai (étranger, en terre chinoise) à ma bonne habitude de ne vouloir avoir affaire qu'à des locaux (qui parlent anglais un peu  beaucoup  s’il vous plaît...) et je sympathise avec Wan Qi Wen, alias Amélie (pour Amélie Poulain, me dira-t-elle plus tard) qui bientôt m’accompagne pour acheter un... portable ! Ah il est loin le temps du marchand de Venise perdu sur la route de la Soie ! J’ai effectivement décidé de suivre les conseils d’un ami et de m’acheter ce précieux sésame pour les moments de détresse dans ma tour d’ivoire linguistique. Bien mal m’en a pris car il me servira trèèès trèèès vite !

Wan Qi Wen "Amélie"

Le soir je découvre la merveilleuse cuisine cantonnaise. Inutile de vous dire que les menus sont en chinois, mais je me laisse guider par l’odeur des 10 plats de la table voisine. Guangzhou (Canton), la capitale de la province du Guangdong est un haut lieu de la gastronomie chinoise et j’en découvre enfin les premières saveurs ce soir. C’est digne d’un festin ! Poisson au gingembre et oignons chinois, plat de tofu pour 5 personnes si ce n’est plus, côtes de porc dans une sauce aigre douce très subtile. Sans vouloir offenser personne, on est loin des ‘chinois parisiens’, très loin...

Un festin !

Chaque fois qu’on me sert du thé, j’apprends à fermer mon poing et à taper doucement 3 fois la table avec les phalanges de mon index et de mon majeur. Amélie m’en explique la coutume : ‘ au temps de la dernière dynastie, un des empereurs Quing a voulu se rendre incognito dans notre province éloignée de Pékin. Dans la cité interdite, la coutume voulait qu’à chaque cérémonie du thé, les sujets s’inclinent devant l’empereur. Pour éviter d’être découvert lors de son voyage loin du palais, l’empereur demanda donc à sa cour de taper discrètement du bout de leurs phalanges en signe de soumission. Les phalanges représentant les genoux... “On s’incline devant l’empereur". Dès lors chaque cantonnais a gardé la coutume et partout on peut voir ce geste lorsque le thé est servi.

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20 mars 2008 4 20 /03 /mars /2008 12:31
L'arrivée a été presque aussi épique que le départ, sauf que les piles Duracel arrivent vraiment en fin de vie.

Après des retrouvailles émues avec Multi, (toujours aussi beau qu'un camion), après mon 1er interrogatoire de police où j'esquive toutes les questions (où allez-vous ? quel est votre métier ? Où sont vos amis ? Participez-vous aux J.O. ? Où est votre autorisation de voyager seule en Chine ?...) avec le plus beau sourire, le douanier zélé me laisse partir avec un regard ahurit.

Ensuite je vais mettre 1h30 pour trouver un taxi qui accepte de nous emmener jusqu'à l'auberge de jeunesse. Sur 35km de trajet, des immeubles, des gratte-ciels, des autoroutes a 4 voies, des ponts qui se mêlent se démêlent, ça pile , ça freine, ça double à droite, tiens quelqu'un traverse l'autoroute... Le manque de sommeil des derniers jours et je suis en proie a des hallucinations ! Mais ce qui me surprend le plus c'est cette lumière indescriptible : il est 17h mais il fait vert gris nuit comme dans une bande-dessinée où le soleil aurait disparu. La couche de polution semble avoir absorbé la lumière.

 

 

La polution lumineuse, elle, ne m'empêchera pas de m'endormir a 7h30 heure locale (chez vous 12h30) dans une auberge de jeunesse comme jamais je n'en avais imaginé : chambre de 3 lits superposés, spacieuse et impeccable, rangements adaptés à des bagages énôôôrmes, salle de bain et toilettes incluses !!

 

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19 mars 2008 3 19 /03 /mars /2008 07:30
Mercredi 19 mars, 14h : plus que 5h30 et je décolle. J'ai mal au ventre. Mon appartememt semble avoir subit le passage d'un ouragan. Quand mes amis Muriel et Pierrot arrivent pour m'aider dans les derniers préparatifs, j'ai envie de m'écrouler dans leurs bras mais je reste digne ! Je dois encore passer à la banque, fermer définitivement mes sacs, ranger mon appart, mettre en ordre les paperasses pour mon frère...

17h30 : aéroport Charles De Gaulle... Je panse une dernière fois Multi, je voudrais presque l'embrasser ainsi que le bagagiste qui l'emporte... Juste lui dire qu'il (Multi) m'attende et sache se défendre en cas d'attaque de valises sans vergogne, qu'il (le bagagiste !) prenne soin de lui, qu'on (Multi et moi...) n'est pas encore partis mais presque arrivés... Ah mais voici déjà le temps des au-revoirs... Au champagne s'il vous plaît ! Muriel et Pierrot me donnent la main jusqu'à la porte d'embarquement. Qu'il est difficile de partir...



Puis c'est la douane, oui j'ai mon passeport, mon visa, mon billet, ma tête et le coeur à l'envers, l'attente dans la salle d'embarquement, l'embarquement... Mon siège ! Je pense m'écrouler et me réveiller une fois à bon port comme à chaque départ, mais à peine suis-je assise que mon voisin de droite engage la conversation.

C'est parti ! Il est 19h30, l'avion décolle, ma peur avec, bientôt j'aurai des ailes. La conversation avec Nelson, marin philippin, durera jusqu'à 5h du matin. Je dois être branchée sur une pile Duracell longue vie.

Le voyage commence...


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1 février 2008 5 01 /02 /février /2008 15:57

Après le rêve du voyage, l'atterrissage ou autrement dit la préparation du voyage. On commence par faire des listes, puis des listes et encore des listes... Visa, vaccins, cartes, ah oui... Se mettre en quête d'une monture... Emporter une tente malgré l'interdiction de camper ?... 1 ou 2 paires de chaussettes ? 1 veste goretex contre la pluie, 1 sac de couchage ou un drap sac ou... les 2 ? L'appareil numérique pour le carnet de route mais quel appareil argentique ? Car chaque gramme compte pour un tel voyage ou alors mes jambes et mes mollets s'en souviendront trop longtemps.

Bien sûr les listes évoluent, les listes se perdent aussi quand on s'appelle Camille. La Course contre la montre est engagée.

J'achète un vélo de randonnée, solide et classique. L'important, m'apprend-on, c'est qu'il soit réparable aux 4 coins du monde. Bien ! Mon oeil est aimanté par sa couleur : ROUGE ! (qui tire sur bordeaux, mais rouge quand même). Rouge comme le drapeau chinois, rouge comme le coeur, rouge comme la passion !!! C'est sûr, de belles aventures nous attendent. Il est baptisé par -10°C dans les Highlands écossais à Noël et dès lors nous apprenons à nous connaître. Mais Multi - ainsi s'appelle t-il - a du caractère et ne se laisse pas apprivoiser du jour au lendemain. Patience, patience, au fil des kilomètres parcourus ensemble, parviendrais-je à le dompter ?
Ou alors... qui domptera qui ?!

Ensuite je me mets en quête du matériel adéquat pour ce voyage: guides, livres que je dois lire avant de partir, matériel photo, outils indispensables pour la réparation du vélo... Je n'y connais rien, mais j'apprends chaque jour et surtout chaque vendredi dans un atelier vélo mené par un génie cubain de la débrouille, Enrique. Avec lui, dévoiler une roue, c'est les doigts dans le nez. J'essaie de tout retenir - mission impossible - pour le jour où, sans rustine ni chambre à air, à "mille lieues de toute terre habitée", je devrai réparer mon pneu crevé avec un bout de bois... Si, si véridique, il parait que c'est possible !

Le billet en poche je peux maintenant imaginer de m'attaquer au sujet "VISA". Ça n'est pas une mince affaire. "Visa touristique : Visa L, validité de 3 mois et durée sur place de 2 mois" Je suis un peu étonnée, comment dois je comprendre cela? 2 ou 3 mois... Et moi qui ai besoin de 6 mois ! Oui, mais 6 mois ce n'est pas possible puisqu'on ne peut rester plus de 2, voir 3 mois sur le territoire chinois. Aaargh ! En même temps je lis " la Chine et les chinois " publié il y a plus de 80 ans, et j'entr'aperçois ce pays à travers le regard de Lin Yutang qui a su "puiser avec intelligence aux racines culturelles les plus profondes de son pays".

Je dois également anticiper la suite de mon voyage en Chine et prévoir le "comment-du-pourquoi-c'est-où-qu-il-faut-les-prendre" des Visas pour l'Asie centrale. Car nous irons ensemble jusqu'à Pékin passer le relais aux athlètes Muriautins sélectionnés pour les JO, et ensuite ma boussole interne m'indiquera plein ouest ! Ma ligne d'horizon sera celle des sables brûlants du Taklamakan et les confins de la province du Xinjiang.

Donc, l'équipement primordial en "poche", l'achat du billet d'avion pour mon point de départ (chinois) conclu après maintes tergiversations, le poids minimisé, les formalités administratives plus ou moins résolues (disons que je sais où je vais...), il me reste à résoudre le problème de l'eau et le dilemme du solaire ou non. Je m'explique : en Chine l'eau est non potable. Connaissant mon incapacité à dire NON quand on m'offre à boire ou à manger par peur de donner le sentiment de rejeter l'hospitalité, je dois traiter l'eau avec des pastilles spéciales qui tuent les microbes ou mieux la filtrer avec une pompe, cela permet même d'enlever la pollution (je pourrais m'entraîner avec l'eau de la Seine tiens ... ??!!). Afin de ne pas être confrontée à l'impossibilité de charger mes batteries en tout genre, l'achat d'un panneau solaire pliant me rendra indépendante ou presque par beau temps (je vous expliquerai plus tard comment cela fonctionne, promis) !

J'arrive alors dans la dernière ligne droite avant le départ... Celle où on sent le ventre se serrer, celle où les racines semblent vouloir pousser dans vos pieds et vous dire "pourquoi tu pars ?", celle où on essaye de voir, ne serait-ce que pour un regard, tous ceux qu'on aime et qu'on laisse. Et pourtant que d'excitation à l'idée de ce voyage. Pour moi, c'est le grand saut dans l'inconnu. J'ai beau avoir lu plus que je n'en peux avant de partir, je sais que RIEN ne sera comme je peux l'imaginer.

Et puis, comme disait le grand écrivain voyageur, Nicolas Bouvier :

EN ROUTE, LE MIEUX C'EST DE SE PERDRE. LORSQU'ON S'ÉGARE, LES PROJETS FONT PLACE AUX SURPRISES ET C'EST ALORS, MAIS ALORS SEULEMENT, QUE LE VOYAGE COMMENCE.

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