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25 mai 2008 7 25 /05 /mai /2008 11:37
Tianmajie-Lijiang, 88,42km. Je démarre ma journée avec une soupe de pâtes copieuse et largement pimentée, en pensant que ce soir on m'attend à Lijiang. Quel bonheur d'être attendue quelque part !...

Au loin, les contreforts himalayens...

Je m'abrite du soleil comme si j'en avais horreur, mais c'est toujours en pensant à mes yeux. Au sortir de Tianmajie, une vaste vallée, le ciel est parsemé de gros nuages, et les montagnes m'encerclent. J'approche des contreforts himalayens, je le sens. Au milieu des nuages, mon regard s'arrête net... Enfin, Elle est là, cette montagne tant espérée... Un sommet de glace et de neige émerge au milieu du ciel, loin, à l'horizon. Son nom m'est encore inconnu. Tout ce que je sais, c'est que c'est ma direction. Alors je pédale avec ce point fixe... en tête seulement, parce que la cime est bien vite reprise par les nuages. J'alterne entre vallées entourées de montagnes et mur de montagnes qu'il faut franchir ! Le jaune du blé contraste avec le bleu du ciel et le vert des montagnes, la luminosité s'accroît à mesure que l'on gagne en altitude. J'aime cette lumière par dessus tout mais elle est en train de devenir l'ennemie de mes yeux larmoyants.

Vers midi, au sommet d'une côte, je tombe sur un énième marché, c'est l'embouteillage monstre dans la rue. Je laisse en toute confiance Multi sur le côté de la route près des étals de fruits et me fonds dans l'ambiance colorée et animée de ce marché de montagne.

J'ai quitté les Bai pour pénétrer dans le territoire des Naxi, qui peuplent tous les environs de Lijiang. Je me glisse près d'un groupe de femmes qui discutent gaiement, les observe. On me tend des fruits, l'une d'elle s'adresse à moi dans une langue chantante où les "r" rrrrroulés ressemblent à des notes de musique. Je me gave de fruits et de beignets de pommes de terre pimentées ( encore !).



Sourire Naxi



Je repars le coeur joyeux (un marché, de l'agitation, et ça repart !) vers ces montagnes à vous faire perdre la tête... ma tête qui bat dans mes tempes comme un métronome affolé ! Je passe une nouvelle fois devant un panneau délavé "Lhasa". Un jour peut-être...aujourd'hui je bifurque en suivant la course des nuages et puis je monte, je monte, je monte, je n'en finis pas de monter et j'atteins un plateau à plus de 3000 mètres d'altitude d'où j'aperçois la vallée de Lijiang. Les 16 kilomètres de descente qui suivent viennent à bout, une nouvelle fois, de mes forces. J'essaie d'analyser ce qui se passe dans mon corps mais j'avoue que je ne suis pas... je m'explique : lorsque j'entame une côte, je trouve un rythme et le maintient. Je m'arrête pour boire tous les 5 kilomètres. J'aime entendre mon coeur qui bat la chamade. Est-ce le rythme lent et régulier mais mon cerveau lui fonctionne à 300km/h. Tout me passe par la tête. Je suis là et ailleurs. Je parle, j'écris, je crois avoir l'idée du siècle bien sûr, pendant ce temps mon coeur s'emballe, mes muscles chauffent, mais je ne sens pas la fatigue. La récompense est au sommet. Toute sles mécaniques fonctionnent a merveille. Avec Multi nous sommes à l'unisson (si c'est pas beau !)...

Coiffes et paniers Naxi dans un marché de montagne

La descente est une autre paire de manches ! C'est comme si les circuits se déconnectaient un à un dans mon cerveau, et je ne focalise alors plus que sur une seule chose : la pente. Me laisser filer, emporter par la vitesse, freiner et éviter les trous. Mes mains se crispent, je pense en blanc. À l'arrivée, je suis vidée. C'est comme si la vitesse avait aspiré mon énergie. Et là, quand je vois un faux-plat, c'est l'Everest qui est devant moi ! J'ai mal des orteils aux sourcils, je ne peux plus poser mes mains sur le guidon (autre petit souci avec les tendons, le canal carpien, et le nerf... cubital !) ou seulement en "danseuse" (les bouts des doigts sur le guidon...). C'est juste un faux-plat, tu ne vas pas t'arrêter là ! On t'attend à 9km... alors je dévalise un magasin qui n'a rien sinon des crevettes sous-vide, des glaces sans goût et du pain rassis. Je bois littéralement ma confiture d'orange au goulot (elle est dans une bouteille...) et repars avec cette lueur au bout du guidon : on m'attend ! Lijiang me surprend par l'ampleur de sa nouvelle ville aux bâtiments modernes. Aux abords de la vieille ville, je pose pied à terre; en fait je ne peux plus mettre un pied devant l'autre. Mes yeux brûlent et me pleurent (écrit tel quel dans mon carnet... le lapsus révélateur m'a plu), j'aimerais mettre ma tête dans un congélateur, mes mains dans un bain Yao alors que mon estomac fait des noeuds de faim.

Mon hôte, Luquiong Luo

Bientôt Luquiong Luo est là (nous nous sommes rencontrés par l'intermédiaire de Couchsurfing, un site web d'hospitalité entre voyageurs, ou pas d'ailleurs), souriante et accueillante. Le dîner avalé à la hâte, mon hôte me conduit à la pièce qu'elle loue dans une grande maison de la vieille ville à une famille locale Naxi. Le bonheur (je sais je me répète...) ! Douche, pièce partagée, anglais, je comprends quelque chose... Tout cela loin de l'agitation du centre touristique. Je m'écroule dans un sommeil profond et me réveille à 6h avec la tête comme une pastèque, les yeux injectés de sang. Je n'ose troubler le sommeil de Luqiong et monte sur le toit où un panorama superbe m'attend.

Au bout de cette ruelle de Lijiang, ma maison !

Dans la matinée, je prends vite conscience que nous n'avons pas du tout les mêmes rythmes avec Luquiong. Je ne tiens pas en place quand elle n'est que zen, méditation et yoga. 1h de ballade, 4h de repos ! Qu'à cela ne tienne, nous sommes aussi indépendantes l'une que l'autre, je m'éclipse alors et la laisse à son yoga tranquille. J'erre au hasard du dédale de ruelles pavées, de vieilles maisons aux toits refaits jusqu'aux boutiques qui se succèdent. En été, les habitants mettent parfois 1h pour faire 500 mètres. Effectivement la popularité de Lijiang a cru plus vite que sa capacité à accueillir des groupes. Cette année pourtant, la ville est "vide" (sans doute l'effet J.O., Tibet, tremblement de terre du Sichuan), Luquiong est guide touristique, au chômage depuis 1 mois.

Je ne suis pas seule !

Sillonnée de canaux, de ponts en pierre et de ruelles, Lijiang était un important carrefour de la route de la Soie du Sud, une place marchande où les échanges étaient à la fois commerciaux et socio-culturels entre les Tibétains et les Bai de Dali. Aujourd'hui le charme n'opère plus. La place du marché, jadis fief des marchands Naxi, est envahie de vulgaires boutiques. Assise sur un banc, cachée derrière mes lunettes pour aveugle, je voudrais remonter le temps mais je me heurte sans cesse à ces images toute faites pour touristes : quand je rouvre les yeux, un homme qui porte des lunettes des années 60 et une peau de yack sur les épaules, me propose de faire un tour dans sa carriole tirée par un.... bélier frisé, avec les bigoudis de madame sans aucun doute. Je pleure où je me fais promener en bélier ?! Un groupe d'enfants âgés de 6 à 10 ans viennent me réciter leur cours privé d'anglais. J'écoute d'une oreille la professeur m'expliquer qu'ainsi les jeunes ne seront plus timides face aux étrangers mais mon esprit vaque ailleurs... Mon regard se pose sur ces vieilles femmes Naxi, dernières dépositaires de cette culture plus que millénaire.

La cape Naxi, appelée Peau de mouton aux yeux de grenouille

Descendants des tribus de Qiang d'origine tibétaine, les Naxis vivaient il y a encore peu en famille matrilinéaires. Les chefs étaient des hommes, mais les femmes tenaient une place prépondérante. Les Naxis sont d'anciens pasteurs sédentarisés. Ils élèvent encore boeufs, chevaux, moutons, cochons et cultivent le blé, le maïs, la pomme-de-terre, le riz, le piment. L'argent, l'or, le cuivre joueront un rôle essentiel dans le développement du commerce et des liens socio-culturels avec les autres ethnies du sud. Leur langue écrite fait partie de la famille tibeto-birmane : elle utilise un système de pictogrammes extraordinaire qui est le seul langage hiéroglyphique encore en usage.

Les Dongba sont les chamans Naxi, dépositaires des écrits et des coutumes, intermédiaires entre les hommes et les esprits. Ils transmettent l'histoire, la littérature et la religion. La religion Dongba est un mélange de bouddhisme et taoïsme.

Les femmes portent un pantalon noir ou bleu foncé couvert d'un tablier bleu ou noir également. Les coiffes sont différentes selon les endroits. À Lijiang il s'agit le plus souvent d'une casquette bleu. Presque toutes portent cette cape en forme de T qui caractérise les Naxi. Attachée par 2 bandes croisées sur la poitrine, elle évoque le jour et la nuit. 7 cercles symbolisent des constellations ou les yeux de grenouille d'un dieu Naxi. Cette cape parfois surmontée d'une peau de mouton, sert à éviter l'usure du panier que les femmes portent en permanence, d'où son nom "peau de mouton aux yeux de grenouille". Elle symbolise le pouvoir des femmes qui portent le ciel sur leur dos.



Les canaux de Lijiang



Je traîne mes savates (c'est le cas de le dire car j'ai l'impression de n'être plus que deux yeux à la place d'un corps) vers la librairie sino-anglaise où je découvre les ouvrages de 2 personnages qui ont marqué Lijiang : Joseph Rock, botaniste excentrique, autodidacte farfelu (il a apprit SEUL 8 langues, dont le chinois à 13 ans), il consacra sa vie à étudier la culture Naxi (1922-1949). Correspondant pour National Geographic, on raconte que lorsqu'il se déplaçait, ses caravanes mesuraient plus de 500 mètres! Quant à Peter Goulart, français né en Russie, il vécut également à Lijiang entre 1940 et 1949. Je lorgne sur son livre "Forgotten Kingdom", le royaume oublié, mais la voix de la raison me rappelle à l'ordre : 4 livres m'attendent dans mes sacoches, sans que je trouve le moment de les ouvrir...

L'après-midi, je renouvelle l'épreuve de force de la gare routière et cette fois-ci la présence de Luquiong est efficace. Il nous (Multi et moi) faudra quand même 1h30 pour prendre un billet pour le lac Lugu alors que la gare est vide... Mon esprit s'évade pendant que Luquiong se laisse expliquer le mauvais état des routes, les risques par temps de pluie, le nombre de morts des mois derniers et j'en passe ! Un instant je me laisse fléchir puis me reprend : c'est quoi cette parano ?!! Je suis venue en Chine pour voyager à vélo, je ne vais me laisser impressionner par la première chef de gare. Surtout quand il s'agit d'accident de bus et non de vélo, ce qui ne m'étonne pas vue leur conduite... Donc me voilà billets en main !! Multi est du voyage car je souhaite faire les quelques 250 kilomètres retour avec lui (raison inavouée : j'ai du mal à me séparer de lui et je ne vais pas lui faire des infidélités en louant un vélo sur place !!).



L'arracheuse de dents



La fin d'après-midi est une longue balade avec mon hôte qui me répète que je dois prendre soin de moi, "Tu as l'air très fatiguée. Pourquoi tu ne t'arrêtes pas ?". Bonne question, pourquoi je ne m'arrête pas ?

La proximité des montagnes et la possibilité d'affleurer les contours du toit du monde m'électrisent. Je ne tiens pas en place. Le souvenir aussi des images de Lu Nan sur la vie quotidienne au Tibet. L'envie de pénétrer dans ces montagnes et d'y rester...

Mais Pékin est toujours bien loin et le temps file. Mon stress augmente à l'idée de devoir accélérer. Le tremblement de terre et ses nombreuses conséquences sont difficilement mesurables aujourd'hui et je ne sais comment orienter mon voyage. D'un autre côté je n'arrive plus à vivre au jour le jour comme j'aime. Ouiiii, j'ai besoin de repos !

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23 mai 2008 5 23 /05 /mai /2008 10:49
Shaping-Tianmajie - 80,59km. Ce matin, je prends la route pour Lijiang sous un ciel à nouveau menaçant. Est-ce l'orage qui s'annonce si tôt? Tous les chemins mènent à Rome, me répète ma voix intérieure, je m'apprête donc à prendre un détour par de plus petites routes. Arrivée à l'embranchement, je suis plongée dans un état de doutes quasi existentiels et met 45mn pour accepter de... renoncer à cette route. Bataille interne épuisante ! À l'orage que je crains une autre raison s'ajoute: dans mon esprit en ébullition permanente a germé une nouvelle idée : si j'arrive demain à Lijiang ou même après-demain, j'ai le temps d'aller au lac Lugu avant mon aller-retour à Hong Kong le 4 juin (j'avais écarté cette idée bien à contre coeur car trop loin...). Ce lac est le berceau de la culture Mosuo, l'une des dernières sociétés matriarcales de la planète, je rêve d'avoir un aperçu de ce royaume de femmes !

Chemin faisant vers Lijiang...

Ma nationale 214 ressemble à une départementale, c'est décidé je continue entre champs de blé et montagnes boisées. C'est aussi la route qui mène au Tibet. "2300km Lhasa" indiquent les bornes kilométriques dans les hautes herbes... et combien de milliers de mètres de dénivelés ?! Je rêve chaque jour un peu plus de parcourir cette route mythique. Aujourd'hui pas de regret à avoir, Pékin est à des milliers de kilomètres et après Dequin, le route est fermée aux étrangers. Dans quelques semaines, la flamme olympique empruntera ce chemin, pas question d'avoir des observateurs occidentaux si inoffensifs soient-ils ! Tout le monde s'accorde à dire que le Tibet restera inaccessible jusqu'à la fin des Jeux Olympiques. Vais-je seulement pouvoir emprunter la route Zhongdian (Shangri La) - Litang ? Si cet itinéraire est en dehors des frontières administratives du Tibet, il s'agit bien du Tibet historique, là où les manifestations et la répression ont été les plus virulentes en mars 2008.

Les paysans étalent le blé sur la route...

Voilà je pédale autant dans ma tête que sur la route... Faut que les paysans de la région me ramènent les pieds sur terre ! C'est chose faite un peu plus loin quand je me retrouve nez à nez avec un champ de blé coupé... sur la route !! Technique innovante pour battre le blé : jetez le sur la route, les camions feront le reste! Sous les roues de bus et voitures, le blé crisse, se sépare de l'épi. Puis la paille est retournée dans l'attente du prochain camion. Enfin, on sépare les épis des grains qu'on charge dans des hottes d'osier en plastique ou sur des tracteurs.

...pour une technique de battage innovante !

Pendant presque 2 jours, je vais rouler sur ces champs de blé et me battre pour que la paille ne se coince pas dans mes pignons. Fin de journée, l'orage gronde. Je m'abrite sous une station de gonflage des pneus de la police chinoise. Bientôt invitée à partager leur repas (il est 17h...), je n'ose dire que je n'ai paaas faim. Je repense aux différents cyclistes rencontrés: ils ont tous écopé de contrôles policiers sur la route alors que je passe encore entre les mailles du filet... S'ils savaient que je suis une dangereuse agitatrice ! Je meurs d'envie de leur dire que j'ai croisé deux de leurs collègues arrêtés au bord de la route, fenêtres ouvertes pris en flagrant délit de sieste. A Tianmajie, une djaodailsouo familiale m'accueille avant la pluie.

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22 mai 2008 4 22 /05 /mai /2008 19:28
Zhoncheng - Wase - Shaping 66,56km. Levée aux aurores, je pars petit-déjeuner sur le marché qui s'anime avec la lenteur des réveils difficiles. Il est 7h, la lumière me brûle déjà les yeux. Tout le village semble converger au ralenti vers cette place centrale sur laquelle un érable gigantesque étend ses branches en signe de protection. Au milieu de femmes Bai, je me régale de boulettes de riz collant caramélisées.

Petit déjeuner sur le marché de Zhoncheng

La coiffe des femmes comporte trois caractéristiques que les Bai décrivent poétiquement comme le vent, les fleurs, la neige. "En forme de demi-couronne, elle est composée de 3 parties : un cercle en tissu de coton à motifs de fleurs, surmonté par une frange courte de laine blanche et sur le côté un gallon de fil de soie blanche. Les fils de soie symbolisent le vent qui souffle des Monts Cangshan, la demi-couronne de fleurs représente les jolies filles de Dali et la frange de laine blanche symbolise la neige qui recouvre les Cangshan en hiver".

Plus que rassasiée, je grimpe dans le village là où me portent mes pas et me retrouve bientôt devant l'entrée d'un temple où des femmes sont en train de faire des offrandes à un bouddha. Je regarde silencieusement, sans vraiment comprendre la cérémonie puis, d'un geste, elles m'invitent à entrer dans le temple où ma présence, si elle n'est pas inaperçue, est totalement "intégrée" par les moines et les croyants qui continuent leurs rites sous mon regard curieux et interrogateur.

Si les Bai sont sous influences bouddhiste et taoïste depuis le royaume de Nanzhao, ils vouent un culte particulier à "Benzhu", le maître du lieu. Dans chaque village, on trouve un autel du dieu du sol, qui protège le village.

Les Bai conservent également un culte chamanique polythéiste, adorant les dragons, les sapins, le vent... Sur les hauteurs du village, je visite trois temples, à chaque fois on m'offre à manger des sortes de beignets huileux à souhait, qu'ils déposent aux pieds de leurs divinités, dans un concert de pétards.

Ce petit village de Zhoncheng me plaît beaucoup. Paisible et retranché vers les imposants monts Cangshan, c'est l'authenticité retrouvée et je me console du cirque de Dali. Comme je suis en avance sur mon périple, je continue de flâner et file vers l'autre rive du lac et le village de Wase. Mais je ne sais pas où est ma tête et pour la première fois, je tourne, tourne et retourne pour trouver le bon embranchement. À un moment je suis même face à l'entrée de l'expressway qui va sur Lijiang ! Ma tête est ailleurs, définitivement. Perdue comme une vache dans un pré, me dirait Penso Positivo. Les nuages moutonnent vers les cimes et le vent a repris du service. Ma tête ailleurs se transforme peu à peu en enclume. Je devrais commencer à m'inquiéter pour mes yeux qui empirent un peu plus chaque jour : je me couche et me réveille en migraine maintenant.

Dans la cour d'un temple Bai

Je tombe sur mon énième accident : un camion de goudron contre un minibus, l'un écrasant l'autre dans le contrebas d'une rizière. Imaginez les dégâts... 2 camions-grue s'affairent à extirper le camion pendant qu'une foule de badauds regarde comme si c'était du théâtre. Je dors dans une petite pension crado à Shaping après avoir rebroussé chemin sans avoir atteint Wase.

Sur la rive Est du lac Herhai

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21 mai 2008 3 21 /05 /mai /2008 15:56
Dali-Xizhou-Zhoncheng- 43,41km. Je me lève avec le soleil qui fait son grand retour ! Après un petit déjeuner muesli-chocolat façon Camille, je traverse la vieille ville qui déjà se remplit de touristes et me dirige vers les villages du bord du lac avec mon fidèle compagnon Multi. Mon intuition était bonne. Le peuple Bai est dans les champs.

Aux alentours de Dali

Je slalome entre les rizières, réponds aux sourires que l'on m'adresse. Aucune route ne suit la rive ouest du lac. La nationale que j'emprunte est collée aux montagnes, peu de circulation car une expressway ou stairway to hell a été construite entre le lac et les montagnes.

Riz repiqué

Alors que je ressers un frein (il est grand temps que je les change en fait), j'entends un "hi" occidental dans mon dos : 3 cyclo-touristes plus high-tech tu meurs !! Je vous laisse deviner la nationalité... Suisse bien sûr ! Nous bavardons un moment sous un soleil de plomb puis je les laisse filer pour m'enfoncer dans le petit village de Xizhou ou je déjeune de délicieuses nouilles sautées dans la communauté musulmane Hui. Le soleil est à son zénith et je commence à sentir les premières gênes dues à l'intense luminosité, ceci malgré mes lunettes de montagne que je déteste porter (ça change les couleurs et j'aime voir les yeux des gens, donc qu'ils voient les miens !).

Dans les rues de Xizhou

Dans mes pérégrinations je tombe sur une grande bâtisse dont les murs ocres attirent mon attention. Une jeune femme qui m'offre de l'eau, suit mon regard et me dit "hotel, american". C'est étonnant ! Au milieu de ces rizières, cette grande maison Bai se fond avec goût dans le paysage. Aucun panneau racoleur. Je laisse Multi à l'entrée sous le regard bienveillant d'un vieux en casquette Mao et passe la porte. Je suis immédiatement accueillie par une jeune chinoise qui m'invite à me reposer, boire un thé, manger. Tout cela dans un anglais élégant aux fortes intonations chinoises. Puis, arrive Ben. Américain parachuté dans ce petit village, il est chargé d'apprendre l'anglais à l'équipe chinoise qui gère le lieu. Xi Lin Yuan est le résultat de vingt ans de voyages et de travail d'un couple américain antiquaire passionnés de Chine et d'architecture. Pendant 5 ans, ils vont rénover cette ancienne bâtisse Bai, dont seuls les murs ont résisté à l'usure du temps et aux dégâts de la révolution culturelle. Sous l'oeil vigilant des autorités qui leurs imposent architectes et entrepreneurs, et avec l'aide de la population locale, ils ouvrent ce centre dédié a la culture et à l'histoire de la Chine.

L'architecture Bai est très raffinée. Les plus riches maisons comportent 3 cours. On accède à la première cour par un portail imposant qui donne sur 3 corps de bâtiment, l'un des murs comporte une peinture et souvent un caractère propitiatoire. La famille habite dans la cour suivante qui ouvre sur 4 autres petites cours à chaque angle. Quatre-vingt-huit cours de ce style seraient conservées à Xizhou.



Au marché de Xizhou



Au-delà d'un hôtel de caractère, Jeanee et Brian Linden souhaitent en faire un lieu d'études, d'ateliers artistiques, un lieu pour partager différentes cultures dans un respect mutuel. Je visite la trentaine de pièces, les chambres d'hôtes, les salles de bain à l'italienne, les pièces réservées à la méditation, la bibliothèque, le petit musée, sans oublier... le bar ! Cette maison est habitée, vraiment ! Les villageois se succèdent, des enfants courent, repartent. Oui, il y a une véritable présence de la population dans ce lieu qui leur appartient un peu aussi. C'est la première fois que je découvre un tel endroit en Chine. Je reste 4h à discuter avec Ben, Americano-vietnamien éclectique. De la production cinématographique pour les grands studios hollywoodiens à la publicité, en passant par des études de chinois, il vit aujourd'hui presque en reclus dans cette grande maison, loin de l'agitation de Dali. L'avalanche de mots est partagée cette fois et nous sommes juste heureux de nous trouver, tromper un instant nos solitudes presque communes.

L'après-midi bien avancé, je continue mon chemin jusqu'au lac Herhai. Couvrant 250km2, ce lac en forme d'oreille, est le 7ème plus grand lac d'eau douce du pays. Des ferries permettent de le traverser d'ouest en est mais les abords du lac sont déserts. Pas de pêcheurs de cormorans en vue. Je rebrousse chemin alors que le soleil décline, la plus belle heure, celle où la lumière adoucit les contours et fait briller les regards. Je tombe par hasard sur un minuscule marché où les paysans, de retour des champs, se pressent. Mon bonheur est là, encore une fois, à l'ecart des itinéraires touristiques et grâce à la liberté que me donne Multi. Je passe 2h parmi ces gens. Les femmes Bai arborent le costume traditionnel tandis que les vieux sont à l'ombre d'un arbre et fument pipes et feuilles de tabac serré, en silence.



Femmes Bai au marché de Xizhou















J'arrive à la nuit tombée (il est plus de 21h car je suis repassée manger avec Ben) dans le village de Zhoucheng, où je suis accueillie par une famille Bai très agréable, qui me prépare une crêpe de... fromage en guise de bienvenue !! Les Bai sont un des rares peuples de Chine à manger du fromage qu'ils fabriquent avec du lait de chèvre.

Retour de l'école

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